Par Louis Denghien, le 21 novembre 2012
L’OSDH – et donc l’AFP et les médias occidentaux – reconnait ce mercredi que des affrontements sanglants ont eu lieu la veille entre les rebelles et les miliciens kurdes à Rass al-Ain, localité située dans le nord-est (et non le nord-ouest comme l’écrit l’AFP) du pays (une cinquantaine de kilomètres au nord-ouest de la grande ville d’al-Hassaka, sur la frontière turque, et déjà enjeu de combats, depuis le début du mois au moins, entre islamistes et soldats syriens. Rami Abdel Rahmane a livré à l’AFP le bilan suivent de cette nouvelle « explication » entre les Kurdes syriens du PYD et les activistes : quatre combattants et un élu local côté kurde, et 24 côté insurgés, ces derniers, selon le président de l’OSDH, appartenant aux groupes radicaux du Front al-Nosra et de Garba al-Sham.
Déjà
bombardés et attaqués au sol par l’armée, les combattants islamistes de
Ras al-Ain viennent de subir de lourdes pertes face aux Kurdes syriens
L’OSDH – et donc l’AFP et les médias occidentaux – reconnait ce mercredi que des affrontements sanglants ont eu lieu la veille entre les rebelles et les miliciens kurdes à Rass al-Ain, localité située dans le nord-est (et non le nord-ouest comme l’écrit l’AFP) du pays (une cinquantaine de kilomètres au nord-ouest de la grande ville d’al-Hassaka, sur la frontière turque, et déjà enjeu de combats, depuis le début du mois au moins, entre islamistes et soldats syriens. Rami Abdel Rahmane a livré à l’AFP le bilan suivent de cette nouvelle « explication » entre les Kurdes syriens du PYD et les activistes : quatre combattants et un élu local côté kurde, et 24 côté insurgés, ces derniers, selon le président de l’OSDH, appartenant aux groupes radicaux du Front al-Nosra et de Garba al-Sham.
Les bilans de
l’OSDH sont d’une fiabilité douteuse, mais enfin l’agence de presse de
l’insurrection ne peut cacher que c’est désormais la guerre ouverte
entre le bras armé de la communauté kurde syrienne et les rebelles, ASL
ou djihadistes, alors que R.A. Rahmane est bien en peine de signaler des
affrontements aussi sanglants entre miliciens kurdes et soldats
réguliers.
Du conditionnel à l’indicatif
Dans ces conditions, les insurgés sont objectivement
menacés dans leur bastion du nord frontalier avec la Turquie, devant
combattre sur deux fronts. Ils s’en tirent avec des effets d’annonce en
annonçant la prise de la base 46, à une douzaine de kilomètres à l’ouest
d’Alep, et la chute imminente de celle de Cheikh Souleimane (25
kilomètres au nord-ouest d’Alep, près de la ville de Dar Ta izza – ou
Dar Teizzah). L’AFP insiste sur le fait que ces deux bases étaient « les deux dernières place-fortes du régime dans cette région frontalière de la Turquie » Et ajoute que la chute de Cheikh Soumeimane « permettrait
la libération quasi-complète d’un large territoire dans le nord-ouest
de la Syrie,allant de la frontière turque jusqu’à Alep« .
Alors, si vous le voulez bien, « corrigeons » un peu l’AFP.
-D’abord la prise de la base 46 est démentie par le
gouverneur d’Alep, et les médias pro-gouvernementaux n’ont reconnu que
la perte d’une petite partie de celle-ci. Qui est bombardée par
l’aviation, comme en atteste une vidéo diffusée par les rebelles
eux-mêmes, le 19 novembre (voir ci-dessous). La rébellion excelle aux
effets d’annonce, prématurés ou immédiatement mensongers.
-Ensuite, comme le reconnait le mode conditionnel utilisé par l’AFP, la base de Cheikh Souleimane « assiégée depuis des semaines » n’est pas tombée à ce jour.
Il n’est pas indifférent de savoir que l’AFP s’appuie dans cette affaire sur une « source rebelle » – même pas l’OSDH – « interrogée au téléphone depuis Antakya (Antioche) en Turquie« . Bien sûr, les reporters de l’AFP ne sauraient être présents sur tous les fronts.
Mais là c’est un peu le principe de l’homme (le correspondant AFP
à Antakya) qui a vu (ou plutôt entendu) l’homme (la source téléphonique
rebelle) qui a vu l’ours (la victoire rebelle de la base 46) ! Mais
après tout, n’en est-il pas ainsi, globalement, depuis un an et demi dans la couverture médiatique occidentale et française de cette guerre ?
-Dans cette région, effectivement la plus infestée par les
bandes, l’armée et le gouvernement conservent des positions, comme par
exemple la ville-frontière de Harem, assiégée sans succès par les
rebelles. La base 46 est située dans le secteur de la petite ville
d’Antareb (ou al-Attareb), verrou des approches ouest d’Alep que les
rebelles de la région d’Idleb s’efforcent en vain de faire sauter depuis
l’été pour tendre la main à leurs camarades assiégés dans la capitale
du nord. Et l’armée lance constamment des attaques, au sol et dans
l’air, sur les positions rebelles.
Et même dans les points qu’ils tiennent, en totalité ou en
partie, ce sont souvent les rebelles qui sont assiégés. Comme par
exemple Idleb elle-même où, de l’aveu d’un média pro-rébellion comme Arte,
l’ASL est enfermée dans une partie de la ville, l’armée contrôlant tous
les abords. Et dans le secteur, les forces régulières frappent à
Taffanaz ou Saraqib, et tiennent le verrou routier de Jisr al-Choughour.
-Agiter la prise, effective ou imminente, de ces deux bases
permet aux rebelles de faire oublier que celle de Wadi Deif,, à Maarat
al-Numan, des noms qui revenaient obsessionnellement dans les
communiqués de l’OSDH et les articles de l’AFP voici
un mois et quelque. Mais depuis deux ou trois semaines, plus rien de ce
côté-là. Pas grand chose non plus sur la bataille d’Alep. L’opposition,
quelles que soient ses nuances, mène contre le gouvernement syrien une
guerre d’abord médiatique, une guerre d’ »agit-prop », où l’annonce
précède le fait, ou nie la réalité.
-Enfin, l’implication des milices kurdes du PYD dans cette
même région frontalière fragilise encore les positions de l’ASL et des
djihadistes. Bombardés et attaqués quotidiennement par l’armée, en butte
désormais au « barrage » des Kurdes, ils ne peuvent, en dépit de leur
propagande et de la proximité du sanctuaire kurde, réaliser d’avancées
significatives ET définitives.
Prenons le pari que d’ici quelques jours,
les rebelles, en tout cas leurs porte-parole, ne parleront plus de ces
conquêtes virtuelles, et seront passés à autre chose. Quitte à utiliser
le conditionnel présomptueux ou l’indicatif mensonger…
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